Le noyau terrestre est riche en soufre

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Le noyau terrestre est riche en soufre

Des chercheurs ont montré que le noyau terrestre contenait du soufre. Pour le montrer, ils ont suivi la piste du cuivre.

Le noyau terrestre est un défi pour les géologues. Situé 2 900 kilomètres sous la surface, cette région est inaccessible et aucun échantillon ne permet d’en étudier la composition. Or celle-ci pose question. Le noyau est constitué de fer et de nickel, mais d’après de nombreuses mesures, il est trop léger pour ne contenir que cela. Des éléments plus légers, tels le carbone, le silicium, l’oxygène et le soufre, entrent probablement dans sa composition. Pour la première fois, des géologues de l’Institut de physique du globe de Paris, de l’université Washington de Saint Louis et de l’université du Maryland, aux États-Unis, ont apporté la preuve que du soufre était présent dans le noyau et représenterait environ 0,5% de sa masse.

Comment Paul Savage, Frédéric Moynier, Julien Siebert, James Badro et leurs collègues ont-ils procédé ? Ils ont comparé la composition chimique du manteau et de la croûte terrestre à celle des astéroïdes. L’aggrégation de ces petits corps célestes est en effet à l’origine de la formation de la Terre il y a plus de 4 milliards d’années, et leur composition doit être comparable à celle notre planète avant la séparation du noyau et du manteau. En analysant les différences de composition entre les échantillons de manteau, de croûte et d’astéroïdes, les chercheurs ont pu déterminer quels éléments ont migré vers le noyau lors de sa formation.

Mais la piste est loin d’être aussi directe ! Le soufre est un élément assez volatil ; il se retrouve facilement à l’état gazeux et a donc pu s’échapper du manteau vers l’espace après la formation du noyau. En outre, des bombardements de météorites ont pu apporter du soufre dans le manteau appauvri en cet élément. La mesure du soufre dans le manteau n’est donc pas fiable.

Pour suivre la part du soufre qui a migré vers le noyau, les chercheurs ont donc traqué un autre élément : le cuivre. Celui-ci est moins volatil et sa proportion n’a pas été trop perturbée par des bombardements postérieurs à la formation du noyau. Mais surtout, le cuivre est chalcophile, c’est-à-dire qu’il s’associe facilement au soufre et a donc accompagné celui-ci lors de sa migration dans le noyau. L’idée est que lors de la cristallisation du manteau, un liquide sulfuré riche en isotopes légers du cuivre, plus lourd que le reste du manteau, a coulé vers le noyau. Le manteau devrait ainsi présenter un déficit en isotopes légers du cuivre par rapport aux astéroïdes.

Paul Savage, Frédéric Moynier et leurs collègues ont analysé 88 échantillons de lave mantellique et de météorites pour déterminer leur composition isotopique en cuivre. Ils ont mis en évidence une différence de rapports isotopiques (65Cu et 63Cu) de 0,025 % entre le manteau et les météorites, qui s’explique par la migration d’une partie du cuivre vers le noyau, et avec lui du soufre. Avec de simples bilans de masse, les chercheurs ont déduit la quantité de cuivre qui a migré dans le noyau : environ 60 % du cuivre terrestre se trouve dans cette région, mais comme cet élément est peu abondant, cela représente moins de 0,05 % de sa masse. Ils en ont tiré la part du soufre : selon leur estimation, il y aurait ainsi 8,5 x 1018 tonnes de soufre dans le noyau, représentant 0,5 % de la masse de celui-ci. Soit tout de même l’équivalent de 10 % de la masse de la Lune…

pourlascience.fr

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